Éditions Repérage: Anthony Guerrier passe le questionnaire de Proust
Anthony Guerrier est né un vendredi 2 octobre 1998. L'ancien élève du Collège de Cote Plage à Carrefour détient une licence en gestion des affaires. Il détient également un double diplôme en management responsable et reconnaissance au travail. Actuellement, Anthony est masterant en coopération internationale et l'aide humanitaire.
Éditions Repérage: Ton occupation préférée ?
Anthony Guerrier: J'aime lire, écrire et parler avec ceux qui savent écouter. J’aime les conversations qui déshabillent l’âme, qui font tanguer les certitudes, qui forcent à voir plus grand, plus loin. J’aime aussi jouer. Comme un enfant. Pour ne pas sentir que le temps me grignote. Pour garder intacte cette part d’insouciance, ce bout de ciel qui refuse de se plier aux chiffres du calendrier.
ER: Ce que tu voudrais être ?
AG: Je voudrais être un docteur. Pas de ceux qui pansent les corps, mais de ceux qui auscultent les failles du monde. Docteur en gestion. Faire avancer la science du partage, disséquer la gestion des ressources comme on dissèque un poème. Rappeler qu'il y a assez pour tous, mais que l’avidité a toujours trop faim.
ER: Ton principal défaut ?
AG: Je ne me concentre jamais sur une seule chose à la fois. Mon esprit saute d’une idée à l’autre comme un enfant joue à la marelle. J’effleure, je picore, je m’émerveille. Mais souvent, je laisse derrière moi des choses inachevées, des promesses en suspens, des éclats de monde toujours en construction. J'ai commencé cinq livres et pas un à la hauteur.
ER: La qualité que tu préfères chez une femme ?
AG: J’aime qu’une femme soit en équilibre sur le fil de la justice. Qu’elle sache aimer sans complaisance, dénoncer sans haine, éclairer sans écraser. J’aime celles qui ont le courage de nommer le mal et la tendresse de ne pas y laisser leur cœur.
ER: Ce que tu apprécies le plus chez tes amis ?
AG: Leur obstination à rester debout. Ils tombent, se cognent, saignent parfois, mais ils se relèvent. Ils m’épargnent leurs vertiges, mais m’invitent à leurs ascensions. Avec eux, la vie est un combat loyal où l’on se porte les uns les autres. J'ai connu l'amitié dans le prisme de la naïveté. Je ne garde d'un ami que l'amitié qu'il veut bien me donner et rien d'autre.
ET: Le pays où tu désirerais vivre ?
AG:Haïti. Malgré tout. Parce que c’est ici que ma peau prend sens, que mon souffle s’accorde aux tambours. Parce que ce pays m’a donné une mémoire, une langue, une colère et une tendresse inépuisable. Même mes cicatrices crient son nom.
ER: La commune d’Haïti où tu désirerais vivre ?
AG: Carrefour. J’y ai appris la ferveur et la désillusion, la joie brute et la tristesse dense. C’est là que j’ai dansé sous la pluie, que j’ai goûté mes premières fritures, que j’ai crié mes premiers slogans, que j'ai goûté aux femmes.. . Carrefour, c’est mon point de départ, mon fil conducteur, mon alma mater.
ER: Tes auteurs favoris en prose ?
AG: Lyonel Trouillot, Albert Camus, Guy de Maupassant, Gary Victor, Dany Laferrière, Evelyne Trouillot, Fernand Hibbert… Une poignée de plumes qui savent faire danser la pensée sur le fil du réel. Ils savent dire. Ils savent tout dire.
ER: Tes poètes préférés ?
AG: Georges Castera, Frankétienne, Samuel Taillefer, Jacques Viau Renaud, Jacques Prévert, Jacques Brel… Et d’autres qui murmurent des vérités que seule la poésie sait dire sans crier. Je ne fais que les citer, mais je ne les préfère pas nécessairement dans cet ordre.
ER: Tes peintres favoris ?
AG: Frankétienne, Luce Turnier (Que j'ai aimé et découvert sur Haiti inter) … Et des autres je ne connais que ces artistes anonymes qui exposent à ciel ouvert sur les trottoirs de l'ancien Port-au-Prince et près de la place Saint Pierre de Petion-ville, à la merci du vent et des passants distraits.
ER: Tes héroïnes dans l’histoire d’Haïti ?
AG: Toutes celles qui ont existé malgré l’effacement. Celles qui ont pris place dans l’histoire malgré l’ombre. Celles dont la lumière de l'histoire nous ont fait, malgré tout, parvenir. Sanite Belaire, Victoria Mantou dit Toya, Fatuma... Mais Marie-Claire Heureuse, elle, incarne l’héroïsme à son sommet : soigner l’ennemi, porter l’humanité au-dessus des batailles. Elle était la Croix-Rouge avant que le monde ne la nomme. Le croissant rouge avant la lettre.
ER: Tes héros dans l’histoire d’Haïti ?
AG: Dessalines, Charlemagne Péralte, Paul Eugène Magloire. Trois hommes, trois visions, trois manières de rêver un pays qui peine encore à les suivre.
ER: Les personnages historiques que tu méprises le plus ?
AG: Michel Joseph Martelly, si je dois rester dans l’actualité. Mais la liste est longue : les Duvalier, Jean-Bertrand Aristide, Jean-Baptiste Conzé… Et au-delà de nos frontières, Hitler, et tous ceux qui ont cru que le pouvoir pouvait se bâtir sur des cadavres.
ER: Tes héros dans la vie réelle ?
AG: Ma mère qui n’a jamais renoncé à la lumière. Mon père qui cherche encore son étoile. Et tous ces Haïtiens qui, avec presque rien, continuent d’émerveiller le monde.
ER: Le don de la nature que tu voudrais avoir ?
AG: Créer la vie. Donner naissance à autre chose que des idées.
ER: Ton rêve de bonheur ?
AG: Un matin, une femme, des rires d’enfants, l’odeur du café, la certitude que l’amour n’a pas fui.
ER: Quel serait ton plus grand malheur ?
AG: Que le bonheur me glisse entre les doigts. Que ma vie ne soit qu’une succession de jours sans lumière, une errance sans fin, une survie sans saveur. Que je perde ma jeunesse.
ER: Comment tu aimerais mourir ?
AG: Après avoir réussi à devenir immortel. Mais si ce n’est pas possible, alors vite, sans le temps de négocier avec l’inévitable.
Legagneur Mikintia
Mon très cher parrain t'es l'un des héros dans ma vie réelle.
March 15, 2025 - 01:38:45 PMJe suis sur que tu deviendras immortel comme tu le dis pas physiquement bien sûr mais plutôt dans la mémoire de tous.